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Travailleurs saisonniers mexicains et agriculture du Québec

Date

2013

Auteurs

Sara Lara Flores

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Bulletin de veille stratégique

Volume

10

Numéro

2

Texte complet

L’ampleur de la migration mexicaine aux États-Unis est sans aucun doute un phénomène de grande importance. En 2012, l’Institut National de géographie et statistique du Mexique (INEGI) a rapporté une perte de population de 27.6 personnes pour mille habitants (Boletín de prensa 330/12). On calcule que 13 millions de personnes nées au Mexique vivent aux États-Unis de façon légale ou illégale, soit l’équivalant de 11.5% de la population totale du Mexique. Ils forment la première minorité hispanophone des États-Unis. Néanmoins, depuis la crise mondiale de 2009, la migration mexicaine vers les États-Unisstagne. Les transferts de fonds qui étaient, après le pétrole, la deuxième source de devises pour le Mexique, ont décliné de façon alarmante. Selon la Banque de Mexico, les transferts de fonds vers le Mexique sont passés de 26 058 millions $US en 2007 à 22 445 millions $US en 2012. De plus, le retour d’un grand nombre d’émigrés mexicains vers le Mexique, faute d’emploi ou à la suite d’une déportation, est préoccupant à cause des conséquences économiques, politiques et sociales que cela implique dans un contexte national fort peu favorable où les indices de marginalité et de pauvreté progressent sans cesse. Par exemple, au Mexique la population en situation d’extrême pauvreté est passée de 11,7 millions en 2010 à 13 millions en 2012.

De son côté, la migration du Mexique vers le Canada est quantitativement peu significative. Cependant, il n’en est pas moins vrai que ce pays est la deuxième destination internationale des Mexicains. Dans ce cas, la migration irrégulière est pratiquement inexistante. Le profil des Mexicains au Canada est très diversifié du point de vue de la qualification professionnelle, du statut migratoire et des formes d’insertion dans l’économie canadienne ; le groupe le plus nombreux de migrants est celui des travailleurs saisonniers qui rentrent au Canada grâce au Programme de Travailleurs Agricoles Saisonniers Étrangers (PTAS). Selon Alan Simmons, Statistiques Canada a comptabilisé 50 000 immigrants mexicains en 2006, la moitié d’entre eux étaient arrivés avant 1995. En 2010, on enregistre l’arrivée de 3 866 Mexicains (1.4% du total des entrées dans le pays), dont une proportion importante était représentée par des travailleurs qualifiés; il y avait aussi des étudiants et des personnes sollicitant l’asile politique. Le nombre de travailleurs agricoles saisonniers a connu une constante progression depuis 1974, année de la signature d'un protocole d'entente entre les gouvernements du Mexique et du Canada. Aujourd’hui, le Mexique est la deuxième source de travailleurs saisonniers pour le Canada, après les États-Unis. En 2010, les travailleurs saisonniers mexicains, essentiellement une main d’œuvre non qualifiée, représentaient 9.9% de l’ensemble des travailleurs saisonniers étrangers au Canada.

D’après les sources du ministère de travail du Mexique, pour la saison 2012, on compte plus de 17 000 travailleurs saisonniers mexicains qui ont rentrés par le PTAS pour travailler dans l’agriculture canadienne. Selon les données de la Secretaría del Trabajo y Previsión Social, (Mexico, 2012), ils sont répartis ainsi par province canadienne: 49% en Ontario, 20% au Québec, 20% en Colombie Britannique, 5% en Alberta, 2% au Manitoba et 4% dans le reste du pays. On constate que le modèle de migration contrôlé par des programmes d’embauche temporaire et de visas de travail constitue une différence importante par rapport à la situation de la migration mexicaine aux États-Unis.

Au Québec, ce n’est qu’en 1995 qu’arrivent pour la première fois 833 travailleurs mexicains. Ce nombre a augmenté peu à peu et en 2008, ils étaient 3 536 selon la Commission sur l'avenir de l'agriculture et de l'agroalimentaire québécois, dans son rapport : Agriculture et agroalimentaire : assurer et bâtir l’avenir (2008). Selon les estimationsdu Consulat du Mexique à Montréal, ils étaient plus de 4 000 en 2012 . Le recours à la main d’œuvre étrangère est un atout pour les fermiers québécois pour faire face à la crise de l’agriculture dans cette province. Selon le Rapport de la Commission sur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire québécois, les agriculteurs de la province du Québec signalent comme principaux problèmes :

• La compétition accrue provenant des autres pays de l’hémisphère sud et émergents;
• La courte saison de production québécoise qui n’est que de 3-4 mois;
• La parité du dollar qui limite les exportations et favorise les importations;
• L’endettement généralisé des producteurs;
• La très forte concentration de la commercialisation à travers trois entreprises (Loblaw, Sobeys et Métro) qui contrôlent 75% de la distribution alimentaire;
• La pénurie de main d’œuvre.
Cette dernière problématique a commencé à devenir grave pour les agriculteurs québécois à la fin des années 1990, dû à différents facteurs sociodémographiques, mais surtout à l’augmentation de la superficie des fermes, de plus en plus spécialisées, modernisées et intégrées par le secteur de la distribution agroalimentaire. Inévitablement, ce processus de concentration a permis une importante augmentation du chiffre d’affaires des entreprises agricoles restées en place.

Ce sont donc les fermes dédiées aux cultures maraîchères qui demandent de plus en plus de travailleurs saisonniers étrangers ; 74% des agriculteurs qui ont recours à la main d’œuvre étrangère sont spécialisés dans les cultures maraîchères, selon la Fondation des Entreprises en Recrutement de la Main d’œuvre Étrangère (FERME). Selon la même source, en 2011 le secteur maraîcher du Québec était constitué de 1 469 producteurs dont 600 avaient recours à la main d’œuvre étrangère, essentiellement mexicaine et guatémaltèque. Cette dernière remonte à 2003 avec 215 travailleurs saisonniers guatémaltèques venus grâce au Programme des travailleurs peu spécialisés de l’époque. En 2013, les deux groupes de travailleurs agricoles saisonniers sont en semblable nombre présents au Québec. Ces travailleurs effectuent les tâches considérées les plus pénibles (températures extrêmes, en plein champs, etc.) et souvent dangereuses à cause de la manipulation de produits chimiques. Différentes recherches mettent l’accent sur la précarité de leurs conditions de travail et de logement. Elles constatent en particulier les inégalités de leurs salaires fixés à la tâche ou à l’heure par rapport aux salaires de la population québécoise, et des horaires de travail qui se prolongent en fonction de la demande du marché allant jusqu’à douze heures par jour et sans respecter les jours de congé.

Finalement, les conditions de vie de ces travailleurs agricoles saisonniers sont également précaires ; ils sont séparés de leurs familles,obligés de vivre chez l’employeur, parfois dans des logements qui ne correspondent pas aux normes établies, isolés dans des fermes éloignées des localités urbaines, souvent sous surveillance des patrons qui s’arrogent le droit de contrôler leur vie privée, surtout dans le cas des femmes. Ils sont également exclus de la vie quotidienne québécoise par la culture, la langue et la pauvreté.

Ces conditions de vie et de travail clairement défavorables par rapport aux conditions normales exigées par la population québécoise font maintenant l’objet de débats qui mettent en évidence non seulement la fragilisation sociale de ces travailleurs si nécessaire à la bonne marche de l’agriculture régionale, mais aussi des dérives concernant les droits à la personne. Il semble donc maintenant nécessaire de trouver une véritable formule « gagnant-gagnant» entre agriculteurs et travailleurs saisonniers étrangers qui permettent le développement de l’agriculture québécoise tout en offrant de meilleures conditions de vie et de travail aux travailleurs migrants, ainsi que des possibilités d’insertion à long terme dans la société d’accueil.

Notes

Le recours à la main d'oeuvre étrangère est un atout dans cette province. Selon le Rapport de la Commission sur l'avenir de l'agriculture et de l'agroalimentaire québécois, les agriculteurs de la province du Québec signalent comme principaux problèmes:

- La compétition accrue, provenant des autres pays de l'hémisphère sud et émergents
- La courte saison de production québécoise qui n'Est que de 3-4 mois.
- La parité du dollar qui limite les exportations et favorise l'importation
- La très forte concentration de la commercialisation à travers trois entreprises (Loblaws, Sobeys, Metro) qui contrôlent 75% de la distribution alimentaire
- La pénurie de main d'oeuvre (p.7).

Ce sont les fermes dédiées aux cultures maraîchères qui demandent de plus en plus de travailleurs saisonniers étrangers; 74% des agriculteurs qui ont recours à la ain d'oeuvre étrangère sont spécialisés dans les cultures maraîchères , selon FERME. Les travailleurs étranger, essentiellement mexicaine et guatémaltèque effectuent les tâches considérées les plus pénibles (températures extrêmes, en plein champs, etc.) et souvent dangereuses à cause de la manipulation de produits chimiques. Différentes recherches mettent l'Accent sur la précarité de leurs conditions de travail et de logement. Elles constatent l'inégalité de leur salaire par rapport à la population québécoise et de leurs horaires de travail qui se prolongent en fonction de la demande du marché allant jusqu'à douze heures par jour et sans respecter les jours de congé. Ils sont également séparés de leurs familles, obligé de vivre chez l'employeur, parfois dans des logements qui ne correspondent pas aux normes établies, isolés dans des fermes éloignées des localités urbaines, souvent sous surveillance des patorns qui s'arrongent le droit de contrôler leur vie privée, surtout dans le cas des femmes (p.7-8).

Fichiers joints

    Secteurs économiques

    Agriculture and horticulture workers et General farm workers

    Types de contenu

    Policy analysis

    Groupes cibles

    Chercheurs

    Pertinence géographique

    États-Unis, México et Quebec

    Langues

    Français